Qui d’entre nous n’a pas eu cette sollicitation pressante des enfants, au début d’une séance de lecture?
A l’écoute de cette demande, nombre d’entre nous sont gourmands du plaisir de faire partager la découverte des illustrations souvent somptueuses des albums jeunesse.
Au delà de ce plaisir partagé , je me suis souvent demandé si en donnant trop de place aux images , je répondais aux objectifs affirmés par Lire et Faire Lire:
-« encourager, voire déclencher la fréquentation des livres et de la littérature »
-« la maitrise de la lecture et de l’écrit (…) déterminante pour une insertion dans le tissu social, une meilleure compréhension du monde et une capacité à inventer l’avenir »
La réflexion d’une animatrice des temps périscolaires : « On vous a composé cette année un groupe de CP et de CE1, parce que les plus grands, n’aiment plus les livres » m’a aussi interpellé.
Et puis j’avais surtout gardé au fond de ma mémoire le souvenir de ma maitresse de CM1, lisant à voix haute depuis son bureau ,sur l’estrade, le « Livre de la Jungle » de Rudyard KIPLING à un auditoire conquis, dans un silence total. Mowgli , Bagheera, Baloo, la jungle, les mots inconnus, les descriptions, la magie des sonorités ; tout cela avait éveillé en moi des images, des sonorités, des odeurs, des sensations tactiles et gustatives dont, finalement, les chefs d’œuvres du Douanier ROUSSEAU, m’ont paru , plus tard, n’être qu’une illustration imparfaite.
Ces considérations, nous les avons partagées, lors de la rencontre des bénévoles du secteur Angers Sud, le 23 mai dernier à Rochefort sur Loire. Plus qu’une réflexion fastidieuse, il m’a paru plus simple de vous faire part de quelques unes de leurs considérations pertinentes sur les rapports entre images et textes:
– » Chez les enfants il y a les auditifs … et les visuels ; il en faut pour tous. »
– » L’imaginaire se développe, aussi, à partir des illustrations. »
– » Un texte, par sa mise en forme, c’est quelque chose qui se regarde comme une image. »
– » Avec l’omniprésence des écrans, il y a trop d’images ; j’ai constaté qu’au Centre de documentation et d’information (CDI) les enfants ne lisent même plus les légendes des images … »
– » Pour donner plus de poids au texte, je lis l’histoire d’abord, et je montre les illustrations dans un deuxième temps. »
– » Ce que l’enfant entend il le transforme en images et en diverses sensations : bruits, odeurs, toucher, sens du mouvement… »
– » C’est bien de faire des pauses dans les lectures pour laisser le temps aux sensations d’arriver, pour les sentir bouger. »
– » Quand j’ai aimé un livre je suis souvent déçue par le film qui en a été tiré et qui ne correspond pas à mon imaginaire. »
– » Il y a des enfants qui sont de grands lecteurs, j’ai eu un CM1 qui avait déjà lu tous les Harry Potter ! »
– » Il m’est arrivé, à la demande des enfants, de lire un livre sans images. »
– » Pensons que, plus tard, les livres que ces enfants auront entre les mains auront de moins en moins d’images. »
Alors , que retenir de tout ceci?
Certainement pas une vision dogmatique de la primauté de l’écrit sur l’image, mais celle, plus positive, de notre rôle de passeurs ayant à leur disposition des images et des textes qui se valent bien, pour donner le goût de lire.
Quelques suggestions de lectures pour compléter :
- « Ce jour-là » de Mitsumo ANNO (Ecole des Loisirs) : des images sans texte qui renvoient à un riche imaginaire
- « A table Président », « A bas la vaisselle! » de Yann MENS (Thierry Magnier – Romans Jeunesse): du texte, rien que du texte, narrant les aventures hilarantes et très actuelles de la famille Toucouleur
- « On verra demain », « Ni vu ni connu » de Michaël ESCOFFIER et Kris DI GIACOMO ( Kaleïdoscope et Frimousse): des textes très dessinés et des illustrations loufoques à l’humour décapant
En consultant la rubrique « Coups de cœur » du blog , vous pourrez en savoir davantage sur ces auteurs.
Alors,…Bonne lecture!